Publié le 15/04/2005
Le CHU de Poitiers conserve au frais plus de 1.000 échantillons tumoraux prélevés sur des patients. Chef du service d’anatomie et cytologie pathologiques, Pierre Levillain nous a ouvert les portes de la tumorothèque.
Une salle ordinaire au niveau moins 2 du CHU de Poitiers. Deux congélateurs verticaux occupent la majeure partie de l’espace. L’un est vide, l’autre contient un millier de tumeurs. Derrière ces apparences banales, nous sommes en plein cœur de la tumorothèque de l’établissement de soins. Un lieu hautement surveillé. Deux alarmes relient le système de sécurité de l’hôpital. Si la température vient à remonter anormalement, les agents interviennent. Conservés à –80 degrés, les prélèvements sont en «danger» autour de –60. Si personne ne rétablit la température dans un délai raisonnable (quelques dizaines de minutes), des bouteilles de gaz carbonique prennent même le relais. Mais qu’y a-t-il de si précieux à l’intérieur de ces congélateurs pour nécessiter un tel déploiement de forces ? Des échantillons tissulaires de tumeurs… mais pas seulement. «Très souvent, avec l’accord des patients, nous congelons aussi des tissus sains, ce qui peut être important pour les comparer aux tumeurs», ajoute le Pr Levillain, chef du service d’anatomie et cytologie pathologiques. Cette véritable «collection de tumeurs congelées» s’avère aujourd’hui plus qu’indispensable. Contrairement aux autres modes de conservation, la congélation permet en effet de garder intactes les propriétés des tissus, notamment les acides nucléiques et les protéines. «Affiner les diagnostics» «Nous congelons les tissus depuis longtemps. La seule différence, c’est qu’aujourd’hui la congélation des fragments est systématique», poursuit le Pr Levillain. Une automaticité qui permet non seulement «d’affiner les diagnostics», d’assurer aux patients les traitements les plus adaptés, mais également d’effectuer des études de biologie moléculaire sur ces prélèvements dans un but de recherche diagnostique et thérapeutique. L’intérêt de la tumorothèque du CHU de Poitiers s’impose donc comme une évidence aux yeux des médecins, chirurgiens et autres chercheurs. A fortiori depuis sa labellisation par la Direction de l’hospitalisation et de l’organisation des soins (DHOS) en juillet 2004. En franchissant cette étape, le centre hospitalier poitevin a renforcé sa crédibilité dans le cadre du Cancéropôle Grand-Ouest. Et s’est ouvert les portes d’une collaboration grandeur nature avec ses homologues de Rennes, Nantes, Angers, Tours, Brest et Le Mans. «Nous faisons déjà partie du réseau des tumorothèques du Grand-Ouest. Deux informaticiens travaillent aujourd’hui à Rennes et bientôt à Poitiers afin de mettre en place une tumorothèque virtuelle, véritable base de données anonymisée qui pourra être consultée par les équipes de recherche en cancérologie après accord d’un Comité médico-scientifique veillant au respect des règles de bio-éthique», conclut le chef du service d’anatomie et cytologie pathologiques.